Le déclic
Ludovic Piquand, le grand manitou de la manutention
À 35 ans, le patron d’Actemis a remis sa situation professionnelle en cause pour proposer une nouvelle approche de la manutention. Quinze ans après, son entreprise s’est imposée auprès de 4 000 clients régionaux.
Quand à 35 ans on a un poste enviable — directeur commercial de Toyota Equipement Industriel — qu’on est propriétaire de sa maison, qu’on attend l’arrivée d’un troisième enfant dans une famille aimante, et qu’on porte au revers de sa veste un stylo S.T. Dupont, « témoin de mes origines haut savoyarde », on remet rarement en cause le confort acquis.
C’est pourtant cette option risquée qu’a choisi Ludovic Piquand le 2 janvier 2007 : « J’ai vendu tout ce que j’avais pour créer Actemis Manutention », se souvient l’homme. La période s’y prête et lui donne des ailes : « C’était un moment d’euphorie », sourit-il. Quelques mois plus tôt, le concessionnaire de Manitou Toyota pour la région Sud a été mis en liquidation judiciaire en raison d’erreurs de management, alors même que ses marchés, l’industrie et la construction, sont en plein développement.
En quelques jours, il constitue son stock de machines et embauche sa première équipe : 12 personnes, âgées de 18 à 58 ans, toujours en place dans l’entreprise pour celles qui n’ont pas atteint l’âge de la retraite. Il connaît bien les marques : après un bref passage chez Fenwick, diplôme d’ingénieur technico-commercial en poche, il a dirigé la région Grand Ouest des chariots tout terrain de Manitou, puis intégré la direction des ventes du constructeur japonais qui travaille depuis plusieurs années avec l’entreprise.
« L’échec du concessionnaire sudiste a été mon étincelle. Je voulais offrir autre chose aux clients en conjuguant vente, location, maintenance et service. » Il a la confiance des marques, mais il lui faut reconquérir celle des clients lésés. Le défi est de taille, mais son énergie entrepreneuriale emporte tout. Même son père qui a vendu son entreprise de portes et de fenêtres à un grand distributeur, suit son aventure en investissant au capital. En un an, la petite entreprise qui a trouvé à se loger dans un entrepôt d’Émile Barneoud, le fondateur de Plan de Campagne, atteint déjà 10 millions d’euros de chiffre d’affaires. « Les planètes étaient alignées. J’ai appris à maîtriser jour après jour l’inconfort permanent de l’entrepreneuriat », estime-t-il humblement.
L’élan des débuts ne se tarit pas. Depuis 2016, Ludovic Piquand a remis le turbo en reprenant tour à tour plusieurs sociétés complémentaires de son activité (Sudalpes, Bizon Matériel, Prowimat) « pour atteindre la taille critique nécessaire à la couverture régionale des besoins industriels et du secteur de la construction. » Pari gagné : avec un millier de ventes annuelles et plus de 4 000 clients allant de la micro-brasserie à des groupes comme Naos, Suez ou NGE, Actemis Manutention et son groupe AS2PIQ réalise à présent 45 millions d’euros de chiffre d’affaires, avec 130 personnes réparties dans 8 agences en région Sud.
Paul Molga