Embarquement vers...
Ceva Logistics, l’international tout naturellement
L’international, une évidence pour un commissionnaire de transport et logisticien, à fortiori filiale de CMA CGM. Cinq ans après avoir quitté les rives du lac Léman pour la Méditerranée Ceva Logistics poursuit son développement en consolidant ses actifs sur le continent américain, en Afrique, en Asie du Sud-Est et ce, en dépit des secousses géopolitiques mondiales. Entretien avec Mathieu Friedberg, directeur général.
100 % d’international ! Quand CMA CGM rachète le logisticien helvétique Ceva Logistics en 2019, l’entreprise, en difficultés financières, est totalement absente du marché français. « Nous avons procédé au retournement de Ceva et multiplié les acquisitions avec Ingram Micro CLS aux États-Unis, Colis Privé, Gefco et dernièrement Bolloré. Ceva Logistics était déjà très international mais il y avait un trou dans la raquette en étant absent de l’Hexagone. Nous nous sommes rattrapés et sommes devenus les premiers en réalisant désormais 20% du chiffre d’affaires en France et 80% à l’étranger. Notre expansion résulte de l’accompagnement de nos clients qui se développent à l’international et de notre croissance organique et externe. Nous sommes devenus le cinquième logisticien au monde avec 21 mds USD de chiffre d’affaires et 110 000 collaborateurs, dont 300 à Marseille », détaille Mathieu Friedberg, directeur général de Ceva Logistics.
Maintenir la culture d’entreprise dans le monde
Très souvent en déplacement, il part à la rencontre des salariés, visite les plateformes logistiques, les nombreux clients et prospects. Le groupe aligne 12 millions de m2 d’entrepôts ! Comment gérer une entreprise aussi tentaculaire tout en maintenant l’ADN et les valeurs du groupe CMA CGM ? Mathieu Friedberg s’appuie sur une organisation décentralisée autour de cinq grandes régions : Europe, Asie, Amérique du Nord, Amérique du Sud et Moyen-Orient : « Je fais partie du groupe CMA CGM depuis 30 ans, je connais les valeurs et la culture de l’entreprise. J’arrive à embarquer le personnel grâce à du management des équipes. Tous les mois, nous organisons une réunion téléphonique où 3 000 personnes se connectent en deux sessions, matin et après-midi, pour tenir compte du décalage horaire. C’est un moment pour s’informer, pour échanger sans filtre. Les collaborateurs posent beaucoup de questions, nous avons une telle diversité de marché », souligne-t-il.
Ceva considère la diversité des nationalités et des profils, dont la main d’œuvre non qualifiée, comme une richesse. Une grande hétérogénéité de collaborateurs, de marchés, de cultures pour lesquels Ceva apporte une réponse adaptée. Ainsi aux États-Unis, la tension sur le personnel étant très forte, le groupe a déployé à Los Angeles une automatisation poussée de ses entrepôts avec le déploiement des premiers robots humanoïdes : « Dans un environnement où la ressource est rare, où les flux sont soumis à une forte saisonnalité, où le prix de la main d’œuvre est élevé nous faisons appel à de la robotique. En Californie, nous possédons des robots de surveillance que nous n’avons pas en France. Nous nous adaptons en fonction des filières. Dans le domaine de la mode, nous avons tellement de références, de couleurs, de tailles que nous optons pour l’automatisation. En France, nos entrepôts sont fortement automatisés pour la fast fashion », détaille-t-il.
China Plus One , Suez, Panama, Russie…
Quand la chaîne mondiale d’approvisionnement se grippe avec les guerres, les tensions géopolitiques et les difficultés liées au franchissement des canaux de Suez et Panama, Ceva Logistics doit être en mesure d’accompagner les mouvements de fond comme le « China Plus One ».
« Les importateurs qui sourçaient en Chine pour des questions de faible coûts se tournent désormais vers le Vietnam, l’Indonésie. Avec ces événements nous déployons une palette de services dans ces pays pour être en mesure de gérer les flux. Nous étions un acteur actif des Routes de la Soie mais, aujourd’hui, nous sommes attentifs au régime des sanctions russes. Nous accompagnons les clients dans les changements de leur supply chain et en offrant des alternatives en train ou en avion », explique Mathieu Friedberg tout en soulignant la montée en puissance de l’Amérique Latine, de la Turquie, de la Pologne pour les meubles et du Maroc notamment dans le secteur automobile tangerois.
« Nous avons une offre complète en accompagnant les clients très en amont dans leurs usines mais aussi en bout de chaîne comme par exemple dans l’automobile avec la livraison aux concessionnaires et aux particuliers ! », ajoute le directeur. Outre l’automobile, où Ceva Logistics a pris une longueur d’avance, l’entreprise a également conquis des parts de marché dans l’aéronautique, la santé, le luxe et la beauté.
Avec le rachat d’Ingram Micro CLS, Ceva assoit sa présence dans le e-commerce. La filiale de CMA CGM consolide également son activité dans la logistique des grands projets industriels s’appuyant sur le savoir-faire historique des équipes de Bolloré. Ceva gère chaque année, 22 millions d’expéditions terrestres, 2 millions de conteneurs Evp et 900 000 tonnes de fret aérien. La suite ? « Nous voulons unifier les activités, poursuivre l’intégration après quatre acquisitions en seulement 24 mois et devenir le logisticien de référence en France et à l’international », conclut Mathieu Friedberg.
Nathalie Bureau du Colombier