Tête d'affiche
Frédéric Lavergne à la tête d'Erilia
Né dans le Cantal, ayant fait ses études à Toulouse et Montpellier, Frédéric Lavergne a gravi les échelons à Lyon et dans le Nord de la France. Issu d’un milieu modeste, rural, il dirige depuis cinq ans Erilia, l’un des plus importants bailleurs sociaux de France.
« On est des terriens » annonce Frédéric Lavergne pour décrire sa famille, ses origines rurales du Cantal. Petit-fils d’agriculteurs, l’homme de 46 ans affiche la simplicité comme valeur cardinale. De ses origines, il a aussi hérité du sens de la famille et d’un certain goût du travail bien fait. Marathonien chevronné, il cultive encore aujourd’hui une discipline de l’effort et portera d’ailleurs sur quelques dizaines de mètres la flamme olympique quand elle arrivera à Marseille en mai prochain.
Son parcours scolaire commence du mauvais pied puisqu’au collège l’adolescent est turbulent et n’a pas vraiment de très bonnes notes. Il quitte son village et s’installe à Aurillac chez sa grand-mère, le jeune homme s’émancipe. Il se passionne pour le sport et les notes sont en hausse.
Passionné par les chiffres, le jeune homme veut faire de la comptabilité. Il part à Toulouse, puis Montpellier pour ses études. Il s’engage d’abord dans un IUT puis entre dans une école d’expert-comptables où il termine major. Le jeune homme prend confiance en lui et croit de plus en plus en ses chances. Après quelques années, il réalise toutefois que les bilans comptables ne sont « pas vraiment son truc », il passe un concours pour un DESS de finance de marché à Paris et Montpellier. Accepté à Dauphine, il décline et choisit de rester dans le sud avec sa petite amie, devenue depuis sa femme. Fidèle jusqu’au bout.
À Paris, Frédéric Lavergne aurait pu faire carrière dans la finance, mais c’est dans l’habitat qu’il débarque. Encore étudiant, il apprend qu’il sera bientôt père et décide de trouver un travail au plus vite. Président du bureau des élèves, il réalise avec plusieurs amis une brochure avec les CV de différents élèves. Son profil est repéré par la Société nationale immobilière (SNI), dont le siège était à Montpellier. On lui propose un poste d’analyste financier, Frédéric Lavergne saute sur l’occasion et reste dix ans dans la boîte : « J'ai gravi quelques échelons assez rapidement. Au bout de deux ans, on m’a proposé un poste de contrôleur des investissements. Là, j'ai vraiment accroché la matière, le métier même de l'immobilier. J'étais dans l'analyse des investissements, au cœur du sujet, avec les gens qui construisent des opérations de construction. Ça m'a beaucoup plu. »
Après dix ans, le Cantalien a besoin de changer d’air. On lui propose un “pont d’or” à la Réunion, mais il refuse et c’est finalement, le directeur d’un bailleur social à Lyon, qui lui propose de devenir son adjoint, « une expérience extraordinaire ! C’était l’époque des prêts toxiques, on devait redresser la boîte, j’étais tous les mois dans le bureau de Gérard Collomb. On a été auditionné par l’Assemblée nationale. J’ai énormément appris. » Après 18 mois, il suit son binôme, dans le “grand nord”, à Valenciennes pour rejoindre la direction de la SA du Hainaut. Son dernier job de numéro 2 puisque le directeur général part au bout de deux ans et lui laisse les clefs de la maison :« À 37 ans, je deviens directeur général. En fait, au fond de moi, j’avais ce côté “leadership” qui demandait qu'à éclore. Je savais, depuis un moment, qu'un jour, je serais patron d'une structure. Et après, la suite, c'est la vie professionnelle. La SA du Hainaut devient sous son impulsion la Société immobilière du Grand Hainaut (SIGH) suite au rapprochement avec l’OPH local puis, on me propose la direction de Logirem à Marseille. J’ai accepté tout de suite.»
Le sudiste arrivait en terre connue, enfin presque. Charmé par la passion marseillaise, la beauté de la ville, il ne comprend pas tout de suite les codes. Humble, il avoue « avoir fait des erreurs ». Dans la cité phocéenne, les réseaux ont leurs propres spécificités et ne s’attachent pas forcément aux couleurs et aux drapeaux qui les définissent. Au bout de deux ans, on lui propose la direction d’Erilia qu’il accepte. Forte de ses 65 000 logements nationaux, l’entreprise est solide, « très bien gérée » mais un peu « endormie » selon Frédéric Lavergne et surtout « méconnue ». L’entrepreneur se dit : “Il faut garder tout ce qui se fait, mais il faut le faire savoir”. Une marque reconnue a davantage d’opportunités selon lui qui s’attelle à un autre grand chantier, celui de la fusion avec la Logirem, qui ferait du groupe le plus grand bailleur avec 90 000 logements dont 35 000 sur la métropole. Le contexte, reconnaît-il, est « difficile ». La crise immobilière dans la région est « d'abord l'effet de renchérissement des coûts suite à la guerre en Ukraine et puis en parallèle à la hausse des taux. Tout le secteur est impacté, y compris le secteur de l'habitat social ». Erilia, comme d’autres, fait aussi face aux difficultés d’accès au foncier. Pour loger tous les Marseillais, Frédéric Lavergne appelle à une grande concertation de tous les acteurs publics et privés du logement, un plan sur dix ans. Le mordu de course à pied ne craint pas de s'essouffler en chemin, il a l’habitude de tenir la distance.
Anthony Lesme